Signes non pour être complet, non pour conjuguer / mais pour être fidèle à son ‘transitoire’ / Signes pour retrouver le don des langues / la sienne au moins, que, sinon soi, qui la parlera ? H.M.
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30 juin 2011

Paris carnet de la patience 29

Fête de la Musique. ("Seigneur, préservez-nous de la Fête de la Musique…") Jean-François me propose la Butte aux Cailles. On y trouve de tout: ici, des quinquas bluesy – un chanteur en perfecto, la chanteuse à la voix grave –; là, des jazzeux bedonnants; plus loin, des sonorités et des jeux d’écho seventies; et puis, un dreadlocks pêchu à la voix cassée, "Redemption" et deux allumés qui dansent devant la scène (tandis qu’une jeune fille, portant une casquette à large visière et l’œil collé à son réflex entrée de gamme, cherche à saisir l’instant); et puis, la découverte: des jeunes (vingt ans peut-être, en moyenne) qui assurent total niveau funk-fusion, et là-dessus deux rappeurs qui ont plus de bouteille (la trentaine au moins), un mélange qui fonctionne, le public en redemande. À la fin, je pose la question au guitariste: "Vous êtes d’où?" Ils sont d’ici, du 13e. J’étais frappé de la diction rap, très articulée: tout s’explique. Bref, ils n’ont pas de CD, mais une page Myspace. Ils s’appellent Ballade mentale. (Les deux "l", je ne sais pas si c’est voulu, mais ça en jette.) Sur le site, on les voit dans une émission de Bastille-TV, laquelle ne dit pas grand-chose de l’énergie que ça dégageait, sur cette petite place, au bout de la rue des Cinq Diamants.
Maintenant, il est une heure et demi du matin. La techno a pris le pouvoir dans tout Paris.
Allez, moi je rouvre le carnet de la patience. Et j’écris: Fête de la Musique. "Seigneur, préservez-nous de la Fête de la Musique..."

04 mai 2010

Paris carnet de la patience 7

Sortant de la BNF, suivant le conseil de Jean-François, je me suis attardé dans les parages.
Remonté l’avenue de France, descendu la rue Thomas Mann.
Là, une pancarte: empaysagement en cours; la coque des "Grands moulins de Paris", que je devine entre les clôtures mobiles bardées, grises et vertes, sera conservée. Tout autour, un parc, un quartier sortiront des ruines arpentées autrefois par l’homme au solex.
Je repars.
Bâtiments modernes, design, colorés, dotés de terrasses, de renfoncements, certains s’effilant par le haut. Angles rentrants et proéminences. Idée de modules. Idée, pour tout dire, de ville qui sent à plein nez le dessin assisté par ordinateur. Mais les immeubles de la Belle Époque sentaient, eux, j’imagine, les planches des beaux-arts.
Il est 20 heures. Le quartier est quasiment désert.
En approchant de son extrémité sud, avant un autre chantier, en deça des boulevards extérieur et périphérique, je croise seulement un type qui flâne comme moi et qui porte un Nikon en bandoulière.
On se regarde.
Zone pour esthètes du XXIe siècle.
Après, je rentre.

20 juin 2007

Je rentre demain

Je leur dis que je m’en vais. Certains disent que j’ai raison. Que j’ai de la chance de ne pas vivre ici. D’autres me demandent si je me suis plu dans le village. Ça m’a plu, oui. J’aimerais bien vivre ici, n’est-ce pas? Euh...

Circonstances.
Tous ils savent que j’étais ici. Tous ils savent qui j’étais. Ils m’ont vu passer avec ma Ford ou à pied, le Nikon en bandoulière. Ils m’ont vu, le casque sur les oreilles, pendant les élections.
Ils m’ont laissé faire. La plupart, je crois, approuvaient en silence. Ceux qui m’ont interpellé voulaient seulement officialiser leur accord. Comme hier, le correspondant local de la Gazzetta del Sud. 45 ans de chroniques, et quelques-unes dans le Corriere della Sera. Il a dit que j’ai un bel appareil photo. (Il sous-entend peut-être que je ferais mieux de viser autre chose que la station-service.) Ensuite, il m’interroge. Est-ce que je sais où se trouvait le village, à l’origine? Est-ce que j’ai vu les tombes creusées dans la colline? Un peu. Il montre la colline. Il marque son territoire. Je crois qu’au fond, il me dit que j’étais un invité, un simple invité. Je n’aspire à rien de plus.
Il fera un papier sur mon bouquin. – C’est en français. – Ah bon? On s’arrangera.
L’ami de mon cousin, samedi soir, m’a dit qu’il veut faire plus. Il veut organiser une fête pour le livre. Je dis que c’est un roman, que ça ne porte pas à proprement parler sur le village. Il dit que ça ne fait rien, que c’est un livre et que je suis d’ici.
Certains me disent que mon dialecte est parfait. Certains me disent que je parle italien comme un étranger – un étranger qui parle parfaitement l’italien, mais dont on sait, dès la deuxième syllabe, que c’est un étranger.
Mon grand-père, c’était le petit qui venait au bar de la place, celui qui n’existe plus? Oui. Mon père, c’est celui qui porte la moustache? Oui.
L’été est là. J’endosse mes habits d’été, mes habits colorés. Ils me disent que c’est plein de couleurs. Je leur dis que c’est mon uniforme de touriste. Sourire.
Un uniforme, pas un déguisement. Je me suis déguisé en villageois. Juste pour le printemps. Je vais ranger le costume dans le roman. Cela, je ne le leur dis pas.
Ils me disent bon vent.

17 octobre 2006

Éclaireurs

Samedi, on part en Sicile une semaine, mon père, Sylvie et moi. Officiellement, pour cueillir les olives. Officieusement, pour prendre contact avec celles ou ceux que je serai susceptible d'interroger, cet hiver, quand je retournerai là-bas. La présence de mon père devrait faciliter ce premier contact.

J'ai investi dans un réflex numérique que j'essaie d'apprivoiser depuis deux jours. J'y pense: voilà un premier sujet à commentaires. Si les personnes qui consultent ce blog devaient trouver à redire aux photos qui le parsèment, qu'elles ne se gênent pas pour pointer tel ou tel problème. Je nage pas mal encore dans la balance des blancs, la vitesse d'obturation, la sensibilité iso et autres assistance AF. Pour info, la photo de la maison (13 octobre) a été prise avec un automatique.

Départ pour mon île, donc. Vert paradis... enfin, jaune plutôt, mais paradis c'est sûr, jusqu'à récemment (disons l'adolescence, ce qui, je le concède, n'est pas si récent). La démystification sera au rendez-vous. Ne serait-ce que pour les oliviers: ils auront sans doute été nettoyés par quelques-uns parmi ceux – tout le village, en fait – qui savent que les proprios n'habitent pas la porte à côté. L'objectif de mon père est modeste: 200 kilos. On verra bien.